Formulation de question à privilégier
Au-delà de structurer son questionnaire et de lui trouver un titre adpaté, choisir la bonne formulation des questions est une autre étape à ne surtout pas négliger lorsqu’on rédige son questionnaire d’enquête.
La relecture des questions
Lorsque l’on rédige un questionnaire pour une étude quantitative (voir les définitions et modèles de rapports), il faut toujours se mettre à la place d’un répondant. Si on a soi-même du mal à répondre à une question, ou même à comprendre son sens, cela signifie que sa formulation n’est pas la bonne et qu’il faut la corriger.
Le risque de questions mal formulées, c’est de biaiser les réponses (réponses non fiables). Car, même de façon totalement involontaire, les répondants auront répondu à côté de ces questions par manque de compréhension.
C’est pour cette raison que pour tout questionnaire, et encore plus dans le cas des questionnaires en ligne (diffusés par Internet), il faut absolument faire relire le questionnaire par plusieurs personnes « extérieures » au projet.
Dans l’idéal, vous devrez être présent à côté de chaque relecteur lorsqu’ils verront votre questionnaire pour la première fois. Vous ne devrez surtout pas leur expliquer quoi que ce soit avant leur première relecture.
Les internautes, qui répondront ensuite à votre questionnaire devant leur écran, n’auront aucune explication de votre part pour les aider. Tout doit être clair dans la formulation des questions, et rien ne doit pouvoir porter à confusion.
Si, parmi vos relecteurs, il y en a un qui bute sur une question (il la lit plusieurs fois avant de la comprendre, ou il n’en comprend toujours pas le sens même après plusieurs lectures), alors il faut absolument revoir la formulation de celle-ci.
La simplification des formulations
Voici déjà plusieurs conseils prioritaires pour vous aider à simplifier la formulation de vos questions :
1/ Utilisez des termes simples, compréhensibles de tous :
Evitez notamment le vocabulaire technique, lié à votre projet, si le questionnaire ne s’adresse pas à d’autres professionnels de votre secteur.
Par exemple, le guide de l’étude de marché que vous êtes en train de lire a été rédigé dans le cadre d’une stratégie de « content marketing ». Mais, si vous n’êtes pas un professionnel dans le marketing, ce terme de « content marketing » ne vous parle surement pas.
2/ Evitez les questions trop longues et trop lourdes :
Les questions de plus de 2 lignes doivent être rares, au mieux inexistantes.
Tout ce qui est secondaire dans la question doit être mis entre parenthèses, voire en précisions (sous la question).
Si la question dépasse 1 ligne, les mots/parties les plus important(e)s doivent être soulignés.
Voici quelques exemples de questions qui tiennent compte de ces deux recommandations :
En moyenne, à quelle fréquence vous rendez-vous dans un café, salon de thé ou coffee-shop (ex : Starbucks Coffee, Colombus Café, Mc Café…) pour y consommer des boissons non alcoolisées (ex : café, thé, chocolat chaud, boissons fraîches…) ?
Lorque vous avez acheté des chocolats belges (pour la consommation de votre foyer ou pour offrir), dans quels formats les avez-vous choisis ?
A quels moments de la soirée (en semaine et/ou le week-end) pourriez-vous vous rendre dans ce bar à coktails pour y consommer des boissons et/ou des tapas ?
3/ Conservez les mêmes termes d’une question à l’autre :
Si, dans une première question, vous parlez de « magasin de vêtements », évitez de parler de « magasin de prêt-à-porter » dans les questions qui suivent.
4/ Evitez de vouloir absolument adapter la question à tous les cas possibles :
Un exemple simple :
Le fait de vouloir absolument adapter la formulation de cette question aux répondants qui ne cocheraient qu’une réponse, ne fait que complexifier la compréhension de cette question. Cette formulation la rend difficilement lisible pour tout le monde.
Préférez donc la formulation suivante :
(1 ou plusieurs réponses possibles)
Il en va de même pour les choix de réponse proposés. Mieux vaut une liste de choix ne dépassant pas les 10 modalités de réponses, avec une modalité « Autre(s), précisez : » à la fin de la liste dans laquelle se retrouveront tous les cas peu fréquents, plutôt qu’une liste exhaustive de 20 ou 30 modalités.
Beaucoup trop longue, une liste avec 20 ou 30 modalités pourrait soit repousser les répondants, soit rendre leurs réponses difficilement exploitables notamment pour le calcul du test statistique du Khi² (sauf si des regroupements sont faits entre les modalités au moment de l’analyse).
Une fois les conseils prioritaires respectés, d’autres cas, souvent moins évidents, vont également nécessiter des reformulations.
Cas 1 :
Voici un premier exemple de formulation de question :
Plusieurs fois par semaine
1 fois par semaine
Tous les 15 jours
Tous les mois
Tous les 2 ou 3 mois
Tous les 6 mois (ex : uniquement en périodes de soldes)
Tous les ans
Plus occasionnellement
A première vue, cette question peut sembler simple et bien formulée.
Sauf que certains des répondants, à la lecture de cette question, vont réfléchir comme suit :
- Pour calculer la fréquence moyenne, dois-je me baser sur les 36, 24, 12 ou 6 derniers mois ?
- Dois-je inclure les vêtements que j’achète pour mes enfants ?
- Dois-je inclure les vêtements que j’achète en cadeaux ?
- Dois-je inclure les vêtements que j’achète d’occasion (vêtements de seconde main) ?
- Dois-je donner la fréquence à laquelle je vais faire des achats dans des magasins de vêtements, ou dois-je calculer le nombre moyen d’articles que j’achète (ex : si je vais une fois par mois dans un magasin de vêtements, mais que j’y achète à chaque fois 4 articles en moyenne, est-ce que je peux considérer que j’achète 1 vêtement par semaine ?)
- …
A quelle fréquence moyenne avez-vous acheté des vêtements (neufs) pour vous-même?
(1 achat peut contenir 1 ou plusieurs articles)
En moyenne, j'ai réalisé...
Plusieurs achats par semaine1 achat par semaine
1 achat tous les 15 jours
1 achat par mois
1 achat tous les 2 ou 3 mois
1 achat tous les 6 mois (ex : uniquement en périodes de soldes)
1 achat par an, voire moins
Certes, la nouvelle formulation allonge la question et peut sembler, au premier abord, la complexifier. Mais elle supprime aussi tous les biais évoqués ci-dessus.
Dans ce premier cas, on peut aussi choisir, pour que ce soit encore plus simple d’y répondre pour l’interviewé, de ne plus parler de « moyenne » et des « 12 derniers mois », mais de remplacer ces termes par la notion de « règle générale ». Ainsi, on optera pour la formulation ci-dessous (tirée d’un exemple de questionnaire dans la rubrique Mode) :
(1 achat peut contenir 1 ou plusieurs articles)
En général, je réalise...
1 achat par semaine
1 achat tous les 15 jours
1 achat par mois
1 achat tous les 2 ou 3 mois
1 achat tous les 6 mois (ex : uniquement en périodes de soldes)
1 achat par an, voire moins
Par ailleurs, toujours au sujet des questions sur les fréquences, on évitera d’employer dans les modalités de réponses les termes « souvent » ou « parfois » qui sont trop subjectifs. Une personne qui achète des vêtements tous les 2 ou 3 mois pourra juger qu’il s’agit d’achats occasionnels (et qu’elle en achète donc « parfois »), alors qu’une autre personne pourra juger qu’il s’agit d’achats fréquents (et qu’elle en achète donc « souvent »). Voilà pourquoi on se basera sur des critères précis et objectifs.
Cas 2 :
Dans le même genre que le cas précédent :
Moins de 5€
Entre 5 et 9€
Entre 10 et 14€
Entre 15 et 19€
Entre 20 et 29€
Entre 30 et 39€
Entre 40 et 50€
Plus de 50€
Si j’ai l’habitude de fréquenter plusieurs bars lorsque je sors, dois-je indiquer mon budget moyen dans chaque bar, ou le budget total à chaque sortie ?
Si j’aime consommer de la restauration dans les bars, en plus des boissons, dois-je l’inclure dans le budget moyen ?
Voilà pourquoi on préfèrera cette formulation (tirée d’un exemple de questionnaire dans la rubrique Commerce/Restauration) :
…Quel est votre budget moyen pour les boissons ?
Moins de 5€ / sortie
Entre 5 et 9€
Entre 10 et 14€
Entre 15 et 19€
Entre 20 et 29€
Entre 30 et 39€
Entre 40 et 50€
Plus de 50€ / sortie
Nous pourrons ensuite lier les réponses à cette question avec celles d’une autre question du type « En général, combien de bars fréquentez-vous à chacune de vos sorties ? » pour calculer le budget moyen consacré aux boissons dans chaque bar.
Cas 3 :
Revenons sur le sujet des achats de vêtements, avec une autre formulation de questions souvent employée dans les études quantitatives :
Moins de 25€ / mois
Entre 25 et 49€
Entre 50 et 74€
Entre 75 et 99€
Entre 100 et 149€
Entre 150 et 250€
Plus de 250€ / mois
Là encore, la question peut sembler simple lorsqu’elle est posée ainsi. Toutefois, en plus des remarques faites dans le Cas 1, lorsqu’on se met à la place de l’acheteur occasionnel, qui n’achète des vêtements qu’en périodes de soldes, difficile pour lui d’estimer son budget mensuel. Et rares sont les répondants qui sortiront leurs tickets de caisse et leur calculette pour répondre à la question.
Voilà pourquoi on préférera utiliser la formulation suivante (tirée d’un exemple de questionnaire dans la rubrique Mode) :
Quel budget mensuel moyen avez-vous consacré à l’achat de vos vêtements (neufs) ?
Moins de 25€ / mois (soit moins de 300€ sur l’année)
Entre 25 et 49€ (soit moins de 600€ sur l’année)
Entre 50 et 74€ (soit moins de 900€ sur l’année)
Entre 75 et 99€ (soit moins de 1200€ sur l’année)
Entre 100 et 149€ (soit moins de 1800€ sur l’année)
Entre 150 et 250€ (soit moins de 3000€ sur l’année)
Plus de 250€ / mois (soit plus de 3000€ sur l’année)
Cas 4 :
Restons sur les exemples de questions autour des budgets et des prix, appliqués cette fois-ci à un projet de micro-crèche.
Voici une première formulation :
… € (par mois)
Il manque ici des repères (sur le nombre d’heures de garde) qui permettront d’analyser, de façon fiable, les réponses.
Si le nombre d’enfants à faire garder et le nombre mensuel d’heures de garde nécessaires sont également demandés dans le questionnaire, alors des croisements pourront être faits entre les réponses à ces différentes questions.
Sinon, mieux vaudra choisir la formulation ci-dessous (tirée d’un exemple de questionnaire dans la rubrique Parents/Enfants) :
… € (par heure et par enfant)
Cas 5 :
Il peut être intéressant, selon les projets étudiés, de chercher à connaître le surcoût que les répondants seraient prêts à payer pour un service supplémentaire, une meilleure qualité…
Ainsi, voilà une première formulation de question dans laquelle on évoque cette notion de surcoût, dans le cadre d’un projet de restaurant rapide :
Quel surcoût (en %) accepteriez-vous de payer pour 1 menu (par rapport à 1 menu non bio et non garanti « origine France ») ?
0% (aucun surcoût)
Entre 1 et 5%
Entre 6 et 10%
Entre 11 et 20%
Entre 21 et 30%
Entre 31 et 40%
Entre 41 et 50%
Plus de 50%
Cette question est déjà assez complexe à comprendre (le surcoût que l’on serait prêt à payer est difficilement interprétable en %). Une fois le sens de la question saisi, il est en plus difficile d’y répondre (la plupart des répondants ayant, à ce stade, le réflexe de se dire « je n’en sais rien »).
Pour obtenir des réponses fiables, il faudrait d’abord donner des repères aux répondants sur le prix d’un menu non garanti bio et non garanti « origine France », pour qu’ils puissent ensuite se projeter sur un éventuel surcoût.
De même, mieux vaut abandonner les % et parler directement en euros (beaucoup plus clair à comprendre, et plus facile d’y répondre).
Ainsi, après avoir expliqué ce que contient 1 menu (exemple : 1 plat + 1 dessert + 1 boisson), et s’être assuré que les répondants seraient prêts à payer au moins 12€ pour 1 tel menu, voici la façon dont pourrait être reformulée la question (tirée d’un exemple de questionnaire dans la rubrique Commerce/Restauration) :
Quel prix maximum accepteriez-vous de payer pour 1 menu similaire, mais garanti 100% bio et 100% « origine France » ?
12€ (aucun surcoût)
13€
14€
15€
16€
17€
18€
Plus de 18€
Cas 6 :
Voici un autre exemple de question concernant un projet de restaurant rapide :
- Oui, à la principale condition qu’il soit moins cher que les autres restaurants rapides du coin
- Oui, à la principale condition que ses plats soient de meilleure qualité que les autres restaurants rapides du coin
- Oui, à la principale condition qu’il soit plus près de mon domicile que les autres restaurants rapides du coin
- Oui, à la principale condition qu’il soit plus près de mon lieu de travail que les autres restaurants rapides du coin
Non, quelles que soient les conditions
Dans ce nouvel exemple, il y a un déséquilibre évident entre les « Oui » et les « Non ». En quelques sortes, on invite fortement les répondants à cocher l’un des « Oui ».
De plus, la question posée telle quelle n’est pas très compréhensible, et les modalités de réponse sont longues à lire. Mieux vaut décomposer cette question en 2 questions distinctes, avec une première question « Oui / Non », puis une deuxième sur le ou les principales motivations (conditions).
Dans l’idéal, pour les questions « Oui / Non », il doit y avoir autant de « Oui » que de « Non ». Le cas suivant illustre d’ailleurs cette recommandation.
Cas 7 :
Dans le cadre d’un projet de création d’un nouveau bar, après en avoir présenté son concept, voici la question que l’on pourrait avoir tendance à poser :
Oui, certainement
Oui, probablement
Non, probablement pas
Non, certainement pas
Le risque c’est que certains répondants cochent « Oui, certainement » ou « Oui, probablement » en sous-entendant qu’ils s’y rendraient par simple curiosité, sans forcément y consommer quoi que ce soit.
Voilà pourquoi il faut plutôt inclure l’acte d’achat/consommation dans cette question, telle que la formulation ci-dessous (tirée d’un exemple de questionnaire dans la rubrique Commerce/Restauration):
Pourriez-vous vous y rendre pour le tester et y consommer des boissons ?
Oui, probablement
Non, probablement pas
Non, certainement pas
Avec cette formulation, il est plus facile pour le répondant de se projeter puisqu’on lui parle à la fois de « test » et de « consommation ». La possibilité de s’y rendre simplement pour y jeter un coup d’œil est donc ainsi totalement exclue.
D’autre part, il est intéressant de pouvoir nuancer les réponses avec le « probablement » et le « certainement ». Etant donné que, dans notre exemple, le bar n’est pas encore ouvert et que les répondants doivent se prononcer sur leur volonté de le tester ou non (sans même savoir où il se situera précisément, quel sera le choix, les prix…), certains d’entre eux auront logiquement des difficultés à se positionner catégoriquement entre le « Oui » et le « Non ». D’où l’importance de pouvoir nuancer sa réponse (ex : c’est probable que je le teste, mais ce n’est pas sûr, cela dépendra de certains éléments tels que son emplacement, le choix, les prix…).
Dans la même idée, voici un autre exemple de formulation possible appliqué cette fois-ci à un projet d’ouverture de magasin, dans lequel on ne parle pas de « test » ou de « consommation » mais plutôt « d’intention d’achat » :
Pourriez-vous vous y rendre avec l’intention d’y faire des achats ?
Oui, probablement
Non, probablement pas
Non, certainement pas
Cas 8 :
Revenons sur l’exemple du bar, avec cette nouvelle question :
Plusieurs fois par semaine
1 fois par semaine
Tous les 15 jours
Tous les mois
Tous les 2 ou 3 mois
Plus occasionnellement
Voilà pourquoi il vaudra mieux poser cette question avec la formulation suivante (tirée d’un exemple de questionnaire dans la rubrique Commerce/Restauration) :
A quelle fréquence moyenne pourriez-vous y retourner (pour y consommer des boissons) ?
1 fois par semaine
Tous les 15 jours
Tous les mois
Tous les 2 ou 3 mois
Plus occasionnellement
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